[Cungressu] Orientazione Generale (1/2)
La Lutte de Libération Nationale Corse s‘est articulée dès son origine autour d‘un axe majeur à savoir la coordination et l’équilibre entre les trois éléments de lutte que sont la lutte armée, la lutte institutionnelle et la lutte de masse.
Dès les années 80, notre mouvement était investi dans la construction de la lutte institutionnelle dans une logique affirmée de libération nationale.
Parallèlement, le courant de LLN mettait en place les fameux contre pouvoirs, syndicats et autres associi afin de donner tout leur poids aux revendications du peuple corse.
Ces évolutions ont permis, dans les années 90, d‘être en mesure de constituer un pôle institutionnel incontournable à l‘Assemblée de Corse, juste après la mise en place du statut Joxe. Cela aurait pu faire changer radicalement la face des choses mais l‘histoire ne se réécrit pas.
Cependant le courant indépendantiste a continué à progresser, y compris au niveau de sa crédibilité au plan institutionnel. Il a été le moteur de toutes les propositions politiques majeures et au coeur de toutes les avancées obtenues au bénéfice de la Corse et de son peuple. Il a ainsi, de l’aveu de tous, y compris de nos adversaires, remporté la bataille des idées et fait valider celles-ci par des assemblées non nationalistes. Aussi, en même temps qu’il ne s’est jamais départi de l’indispensable logique de résistance face à une domination illégitime et injuste, notre courant a également oeuvré inlassablement pour une paix réelle.
Dès le début des années 2000 jusqu‘en 2014, la question d‘une alliance nationale naturelle s’est alors posée. À la suite de la décision historique du FLNC de 2014, Corsica Libera a naturellement contribué à la création de Pè a Corsica, structure commune avec le courant réformiste. Cette initiative a permis pour la première fois, la victoire dans les urnes d’une démarche se revendiquant de l’idée nationale. Malheureusement, il a fallu rapidement constater que cette union n’était que de façade et, par conséquent, inapte à produire des effets politiques majeurs. L’éloignement de nos partenaires d’alors vis-à-vis des engagements pourtant pris solennellement devant les Corses ayant mis de facto un terme à cette expérience.
Cette situation de fait, en contradiction avec les objectifs de lutte qui étaient les nôtres, a surtout eu pour résultat un affaiblissement de nos forces, au profit d‘un courant réformiste facilement happé par des enjeux subalternes de petits pouvoirs au sein du système institutionnel français.
Désormais, sans esprit de rancoeur ou de revanche, le courant de l’indépendance nationale a le devoir de retrouver une place centrale au sein de la vie politique de notre pays. Il en a la capacité s’il situe de nouveau les enjeux réels, s’il rejette l’illusion selon laquelle les institutions actuelles de la Corse disposeraient du « pouvoir », alors que celui-ci est objectivement maîtrisé par les différents rouages de l’Etat français en Corse. En conséquence, accepter de limiter le combat politique à la gestion des institutions actuelles « sur le temps long » revient à accepter le statut « d’élus locaux » assignés à résidence dans le cadre de la décentralisation des régions françaises que le pouvoir français impose.
Aujourd’hui, l’heure n’est plus aux constats, mais au redéploiement de notre mouvement tant d‘un point de vue stratégique et politique, que structurel. Dans la lignée de ses aînés, Corsica Libera a su insuffler les idées de la Lutte de Libération Nationale dans notre société, jusqu’à influencer même les discours de certains adversaires politiques. Ce combat politique a été mené depuis 40 ans par notre courant. Il représente la fameuse bataille des idées que nous avons remportée. Cela est notre ADN et représente ce que nous sommes, avec, pour nos militants, un coût important sur le plan humain et des sacrifices que nul ne saurait oublier. Il est la preuve même du bien fondé de nos revendications. À la différence de bien d’autres formations politiques, nous savons là où nous voulons emmener notre pays.
Actuellement, le slogan d’une « autonomie de plein droit et de plein exercice » est largement diffusé au sein de la société corse, tout en se présentant sous un jour de plus en plus flou, de moins en moins concret, doucement remodelé en une simple étape de décentralisation à la française. Dans la réalité, l’offensive multiforme associant colonisation de peuplement, centralisation technocratique, dépossession foncière, et laminage culturel n’a jamais été aussi forte, et les Corses autant en danger en tant que peuple. Il devient dès lors indispensable de repositionner le discours de l‘indépendance nationale comme socle de notre revendication, et de continuer à démontrer, à travers nos compétences, nos actions et notre projet de société, la viabilité de notre offre politique.
C’est bien au nom de notre droit imprescriptible à l’existence que nous refuserons toute normalisation destinée à niveler et à effacer notre mémoire collective. C’est au nom de ce droit que nous exigeons de vivre chez nous selon nos règles propres. C’est au nom de ce droit que nous refusons que notre pays devienne un espace indifférencié livré aux spéculateurs et aux roitelets en tous genres. Nous ne saurions accepter que la Corse subisse le traumatisme d’une surpopulation effrénée sans que lui soit conféré le pouvoir légal de juguler un flux destiné à transformer le Peuple Corse en une population indifférenciée…
Nos fondamentaux, dont certains n’hésitent pas à se réclamer opportunément tout en continuant de les vider de leur contenu ou d’en retarder à l’infini la concrétisation, sont un axe de travail important à adopter. Ils permettront à la fois le repositionnement stratégique de notre mouvement, seul à même de recréer un nouvel élan salvateur, et de faire éclater au grand jour les dangereuses contradictions de démarches tournant le dos aux objectifs de libération nationale.
À la suite de l’assassinat d’Yvan Colonna dans une prison-abattoir française, la jeunesse corse a démontré par sa détermination et sa capacité de mobilisation qu’elle constituait aujourd’hui l’un des principaux contre-pouvoir dont la Corse a besoin pour affronter la situation et imposer un véritable rapport de force politique. Elle est l’avenir et l’espoir de notre peuple. Ses capacités à s’auto organiser doivent être encouragées et respectées par tous. Elle doit bénéficier d’un soutien massif de toute la société corse, au delà même des organisations politiques ou syndicales.
Aujourd’hui nous sommes confrontés à la violence d’un système qui n’a pour vocation que de réduire à néant les aspirations naturelles d’un peuple sur sa propre terre, et qui n’a jamais renoncé à employer tous les moyens, pour y parvenir. Que ceux-ci soient le fruit de lois injustes et de décisions arbitraires, ou de coups tordus faisant appel aux pires nervis. Face à cette agression permanente et mortifère, des patriotes se sont depuis toujours engagés à défendre la Corse au prix de leur propre sécurité, de leur liberté et, trop souvent, de leur vie. Dans leurs efforts en faveur d’une paix digne et durable pour leur peuple, comme dans les contraintes du conflit, l’espace qu’ils représentent pour les Corses a certainement plus de légitimité que toutes les institutions étrangères qui nient jusqu’à notre existence.
Il est donc évident et naturel que nous réaffirmions ici notre total soutien politique au Fronte di Liberazione Naziunale di a Corsica.
Au-delà d’une orientation générale largement consensuelle au sein de Corsica Libera, et notamment présentée lors de nos Ghjurnate Internaziunale, il paraît important de préciser certains axes d’ordre stratégique, dans lesquels inscrire notre action politique.
Celle-ci se traduit par la capacité de renouvellement d’une démarche qui entend rester fidèle à ses objectifs historiques et qui croit résolument avec confiance, malgré les obstacles, dans la capacité des Corses à trouver les ressources nécessaires pour faire front, une nouvelle fois, face à la situation du moment. Nos militants qui ont depuis toujours payé le prix fort seront au rendez-vous des luttes contre toutes les formes de dépossession et de déculturation, pour l’avènement d’une Nation corse souveraine, plus juste et garante d’une identité singulière forgée au fil des siècles.