Cunfarenza stampa : Poursuivre la construction de la paix
En juin 2014, les militants politiques du FLNC ont fait un choix majeur pour la Corse, à savoir renoncer à une forme de lutte qui, au-delà des sacrifices consentis par eux et par eux seuls, était l’axe majeur des combats du peuple corse pour son émancipation nationale, culturelle, sociale et la pierre angulaire du triptyque des luttes.
Leur lutte politique portait à bout de bras toutes nos autres luttes. C’est elle qui a permis, quoi que puissent en dire certains aujourd’hui, toutes nos avancées, notamment les plus démocratiques, et tous les reculs de l’État français.
Poursuivre la construction de la paix
Ce choix est le seul qui a permis, après 60 années de combats, 5 longues et réelles années de paix. Cette paix, ils en sont à l’origine, ils en sont les artisans avec, en retour, la certitude que nous autres, tous les acteurs de la vie politique en Corse, nous apportions la démocratie dont notre peuple a tant besoin au sortir de la période coloniale. En sommes-nous sortis?
Le maintien de ce climat de paix implique désormais de la part de l’Etat français, le respect des choix démocratiques formulés et réitérés par les Corses et une implication réelle dans cette nouvelle période de relations entre nos deux peuples.
Historiquement donc, après trente-huit années de résistance armée, le Front de libération Nationale de la Corse a annoncé le dépôt des armes. Ce cessez-le-feu unilatéral a été suivi, nul ne songe plus à le nier, de victoires politiques acquises démocratiquement avec 36% en 2015 et 57% et la majorité absolue à l’Assemblée de Corse en décembre 2017.
Les victoires électorales n’ont cependant pas permis une véritable négociation avec la France.
Ainsi, après l’espoir suscité, une grande incompréhension s’est installée en Corse quant à la volonté réelle de l’Etat d’aboutir à une solution politique. Cette désillusion a été alimentée par l’attitude du gouvernement français vis-à-vis des Présidents de l’Assemblée de Corse et du Conseil Exécutif qui ont abouti à une vague promesse d’inclusion de la Corse dans un article mineur de la Constitution française.
Quatre ans après le cessez-le-feu, les prisonniers et recherchés subissent encore les conséquences du conflit. Certains d’entre eux sont encore placés sous le statut de détenus particulièrement signalés (DPS) et emprisonnés loin de leurs familles depuis plus de vingt ans.
Corsica Libera rappelle que le combat historique du peuple corse n’est pas une suite incontrôlée d’événements mais bien le fruit de la stratégie d’une organisation politique majeure qui a toujours assumé ses choix politiques et ses engagements.
Assumant un rôle de fer de lance et de direction politique d’une lutte difficile et inégale pour la libération de notre nation, le FLNC et ses militants en ont d’ailleurs toujours payé le prix.
Durant ces quarante années, notre parti politique, et lui seul, avec toutes ses évolutions, a toujours été aux côtés du Front, de la CCN à la Cuncolta en passant par le MCA ou Indipendenza. Corsica Libera est encore et toujours dans le droit fil de ce combat pour l’émancipation.
Cette constance a forgé une légitimité incontestée. Elle est aussi une garantie pour l’avenir.
Nous avons fait preuve de la même constance dans le soutien humanitaire et financier depuis la Riscossa, Patriottu, le CAR et aujourd’hui Sulidarità pour des centaines de militants politiques poursuivis, incarcérés ou recherchés.
En tant qu’organisation politique majeure de la lutte réunissant la grande majorité de ceux qui ont payé le prix fort des sacrifices consentis, nous saluons la constance de Sulidarità qui a toujours soutenu, parfois envers et contre tous, la totalité des anciens et actuels prisonniers politiques et recherchés.
Ce soutien indéfectible, durant de longues années dans certains cas, ne saurait être oublié pour lui substituer des modes incantatoires inopérants. Seule la stratégie anti répressive doit prévaloir. Dans ce combat, l’improvisation ou la démagogie n’ont pas leur place. Elle doit continuer à être élaborée et menée de manière responsable et efficace, en associant toutes les bonnes volontés.
À deux reprises dans notre histoire, en 1982 et 1990, nous avons construit, tous ensemble, deux amnisties générales, parvenant ainsi à réparer, partiellement, les injustices commises à l’égard des centaines de militants.
La revendication d’amnistie, soutenue par l’Assemblée de Corse et plusieurs dizaines de municipalités, demeure donc pour nous la priorité, encore et plus particulièrement depuis la décision politique du Front. Nous ferons tout pour l’obtenir.
Sur ce point, nous souhaitons que Sulidarità propose la tenue d’une grande mobilisation populaire sur la base de nos revendications politiques, ainsi qu’en faveur du retour des derniers prisonniers politiques chez eux, et pas seulement en Corse, fût-ce à Borgu.
La création d’une commission de travail à l’Assemblée de Corse pour la sortie du conflit
Dans un autre ordre d’idées, nous appellons solennellement l’Assemblée de Corse, dans toutes ses composantes, à participer à la mise en place effective d’un processus politique de règlement du conflit. La confiscation de la démocratie par les clans et par l’Etat a rendu impossible la construction d’un espace public apaisé et démocratique. Cette privation a conduit à l’émergence de la lutte armée, seul moyen susceptible d’interpeller notre peuple sur les enjeux liés à son existence et à le conduire sur le chemin de la conscience nationale. Au lieu de choisir la voie politique, l’Etat a alimenté un cycle de résistance et de répression duquel le Front a réussi à s’extraire avec l’appui des acteurs sociaux, culturels et politiques de toute l’île.
Aujourd’hui, nous nous adressons à nos élus afin qu’ils installent une commission de travail dédiée à la libération des prisonniers politiques et à l’arrêt de toutes les poursuites envers les recherchés et anciens condamnés.
Cette commission devra également jeter les bases d’un texte de loi relatif à l’amnistie liée à la situation politique l’île. Cette proposition de loi élaborée à partir des travaux de cette commission de l’Assemblée de Corse, pourrait être, après son adoption par l’Assemblée de Corse, confiée à nos députés.
Cette commission, composée des différents groupes politiques de l’Assemblée de Corse, pourra intégrer, à titre consultatif, des représentants d’associations humanitaires de soutien aux prisonniers politiques antérieures à la décision de juin 2014 et reconnaissant la légitimité politique de la décision du Front. Elle pourra de la même façon faire participer le collectif d’avocats de Sulidarità.
Elle devra, en outre et tout naturellement, aussi compter, dans ses rangs, les députés et sénateurs de la Corse ainsi que le président du conseil économique et social de Corse.
Elle pourrait aussi intégrer des personnes de la société civile comme d’anciens avocats des prisonniers politiques corses.
En résumé, Corsica Libera et Sulidarità placent beaucoup d’espoirs de notre lutte dans les travaux de l’Assemblée de Corse et dans cette commission qui nous amènera à sortir du conflit.
Elle devra permettre à tous les acteurs politiques de notre peuple de se responsabiliser et d’apporter leur pierre à l’édifice de la paix édifié depuis 2014 par le Front de Libération National de la Corse.
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